mardi 17 février 2009

Pas de liberté sans justice selon la DDHC




La liberté, droit, devoir et vertus.

Article 4 - La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi.

Avant d’aborder cet article 4, je reviendrai un instant sur cette notion de liberté. De par les dispositions de l’article premier et du préambule, la liberté est un droit naturel qui s’établit dès la naissance d’un individu. Les hommes naissent et demeurent libres... Comme le disait Montesquieu : La loi ne crée ni l’égalité ni la liberté, elle les proclame, plus simplement elle les déclare. Nous ne tenons donc pas notre liberté de la loi, ; en dehors de son devoir à proclamer ce droit à la liberté, le seul pouvoir que possède la loi c’est d’y porter éventuellement atteinte. Sachant cela, nos illustres parlementaires historiques ont fait en sorte de dresser des limites infranchissables pour la loi et ces limites sont les précisons de : naturel, inaliénable, sacré et imprescriptible.

La jouissance de ce droit à cette liberté, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, ne peut exister pour un quelconque membre du corps social que parce qu’il y a des règles qui en permettent cette jouissance. Tout comme le chaos n’est pas dépourvu de règles, comme le révèle la structure fractale d’un système chaotique. Un corps social qui n’aurait pas de lois permettant une juste pratique de la liberté se verrait régi par un système fractal propre au chaos et qui s’appelle la loi du plus fort. Système qui, lorsque sévissait la barbarie, s’est imposé sous la forme d’un corps social féodal avec une succession de rapports de suzeraineté croissante. Était d’autant plus libre celui qui était le plus fort, et cette liberté du vassal s’arrêtait à celle de son suzerain, et ainsi de suite. La liberté que proclame la DDHC de 1789 dans son premier article n’est plus celle du chaos, mais celle de la loi morale qui ne fait que constater une réalité parfaitement naturelle. Cette liberté n’étant plus un rapport de force, devient dans son principe supérieur un rapport d’intelligence sociale celui qui se pratique dans une société franchissant un degré plus élevé de civilisation.

Dans son article 2, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, fait un devoir à toute association politique de conserver, notamment à la liberté, son statut de droit naturel, inaliénable, sacré et imprescriptible, et comme cette liberté ne dépend plus de la seule force manifestée, mais de lois humaines en conformité avec celles de la nature, la nécessaire connaissance de ces lois devient donc l’ardente obligation du citoyen qui veut jouir de sa liberté. Ici nous noterons le rapport direct qu’il y a entre ignorance et asservissement, et connaissance et liberté. L’enseignement de ces lois devient une indiscutable et noble servitude à laquelle tout gouvernement, que produisent les associations politiques, doit satisfaire sous peine de corruption caractérisée, d’exercice d’arbitraire et de pratiques d’oppression.

Par l’article 4, la DDHC étend les champs du possible de la liberté en traçant l’amplitude maximum de son horizon. Nous retrouvons là encore, dans la simplicité et la pureté de la rédaction de cet article 4, tout le génie, l’inspiration et la générosité de nos parlementaires historiques. La première phrase de cet article est à elle seule un véritable axiome : La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui... Nous sommes, comme je le signalais précédemment, véritablement sortis du chaos de la loi du plus fort, puisque maintenant la liberté doit pour être correctement pratiquée, se préoccuper du respect de la liberté des autres membres du corps social. Nul doute, que si nos petits enseignants de l’Éducation nationale avaient satisfait aux obligations morales d'une élémentaire conscience professionnelle, en effectuant une transmission correcte de cet enseignement des droits naturels, inaliénables, sacrés et imprescriptibles de l’homme, nous aurions aujourd’hui un plus grand nombre de citoyens de ce pays suffisamment éclairés pour être respectueux du droit des autres. Ce respect de la pratique de la liberté des autres devenant une des premières préoccupations concernant la sauvegarde et la conservation de leur propre liberté. Au lieu de quoi, ils se lamentent (nos enseignants) du manque de respect de leurs élèves ; d’un manque de considération et des parents et de leurs élèves, et de l’ensemble des membres du corps social. Avant que de se lamenter sur les conditions difficiles qui découlent de cette ignorance généralisée, ils feraient mieux de comprendre qu’ils ont été et sont toujours les premiers responsables et coupables de cet appauvrissement social, de cette privation de liberté résultant du maintien dans l’ignorance de ses droits d’un peuple que les gouvernements ont l’obligation d’instruire correctement..

Pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, implique un minimum de sens moral, nous n’en sommes pas encore aux vertus, mais c’est le début du chemin qui y mène. J’ai eu l’occasion de signaler précédemment, que ce droit à la liberté n’était pas égalitaire dans le sens aveugle du terme, mais que cette égalité de droit était fonction de l’utilité commune. La parfaite cohérence de la DDHC se retrouve ici lorsqu’elle proclame la nécessité de se préoccuper de la non nocivité de la pratique de notre liberté. Cette notion, hautement spirituelle, fait incontestablement appel au sens des responsabilités que doit assumer individuellement un citoyen, ce qui est légitimement un degré d’évolution supérieur par rapport à celui d’un individu égoïste uniquement préoccupé de ses intérêts personnels sans aucune préoccupation sociale et du bien commun. Ce qui différencie le citoyen de l’individu ordinaire c’est que le premier pratique sa responsabilité vis-à-vis d’autrui en respectant les règles de civilité telle que celle définie par le début de cet article 4, alors que le deuxième en est encore au stade primaire de l’irresponsabilité et de la pratique de la loi du plus fort. Si certains doutaient de la nature vertueuse et Providentielle de cette Déclaration, le cheminement que je viens de faire au travers de ces quatre premiers articles, est la démonstration évidente et incontestable de sa rigueur morale et de son éthique irréprochable.

Le citoyen se prévalant de la légitimité de ses droits proclamés par la DDHC, doit ici prendre la pleine mesure de ses devoirs. Il lui incombe, sans que cela puisse être jamais remis en question, de se préoccuper dans l’exercice de toutes formes de liberté, de ne jamais nuire... Principe que nous retrouvons à l’identique dans le serment d’Hippocrate que doivent prêter les disciples d’Hermès que sont les médecins. Servir l’utilité commune et ne pas nuire, deux principes figurant dans toutes les grandes traditions philosophiques et spirituelles comme étant le plus haut niveau d’élévation d’un initié. Non seulement la DDHC assure la liberté sur le plan politique et civil, mais elle porte indiscutablement en germe les principes d’une véritable libération spirituelle, c’est en cela qu’elle est digne de son invocation initiale qui sollicitait l’inspiration et les lumières de l’Être Suprême.

Imaginez que ce principe de l'exercice de la liberté dans le respect de celle des autres soit largement partagé dans sa pratique par l’ensemble des membres du corps social... Combien de conflits de voisinages se trouveraient immédiatement résolus, sans qu’il soit nécessaire de faire intervenir l’administration judiciaire pour résoudre ce type de conflit... Combien ce sens de la responsabilité volontairement pratiqué par chacun, placerait les rapports sociaux sur le plan de la courtoisie et de l’élégance au lieu de se généraliser sur le plan de l’agressivité, du rapport de force, de l’invective et de la menace auxquels nous condamne la corruption des gouvernements... La civilisation que contient l’application des dispositions contenues dans la DDHC de 1789, est de nature diamétralement différente de celle que nous inflige celle des gouvernements qui n’ont pour préoccupation que d’en réduire la portée du contenu ou d’en entraver l’application.

... ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits... Bien que, comme je l’ai signalé, la première phrase de cet article 4, soit aussi complète qu’un axiome, nos pères fondateurs de la nouvelle citoyenneté, sans craindre d’être redondants, précisent, comme s’ils redoutaient de ne pas être parfaitement compris par le plus grand nombre, ce qu’il convient d’entendre par ce droit à la liberté. Le citoyen ne peut plus se contenter de jouir de sa liberté, enfin l’idée qu’il s’en fait, sans se préoccuper de savoir si cette liberté peut être pratiquée par ses semblables à l’identique, et qu’elle ne constitue pas en elle-même une entrave pour les autres à faire de même. Dans toutes les grandes initiations philosophiques et spirituelles, dignes de ce nom, il est pratiqué en pleine conscience et responsabilité le libre arbitre. Ce libre arbitre est une faculté supérieure de la Conscience, elle implique un niveau très élevé de Connaissances, et l’exercice d’une volonté constante. Personne ne doit porter atteinte à ce libre arbitre, mais en retour, l’exercice de ce libre arbitre ne doit pas être la cause de l’entravement ou de la limitation du libre arbitre d’autrui. Ceci résulte du fait que les lois d'évolution, celles de la Divine Providence, se reçoivent par adhésion volontaire, à l’inverse de celles du Destin qui se subissent selon les implacables lois de causalité. Là encore, je ne peux que faire le parallèle entre ce qu’exprime de plus vertueux cette DDHC, et les plus hauts degrés de l’initiation philosophiques et spirituels. La corruption des gouvernements a pour conséquence inéluctable d’asservir chaque jour davantage l’ensemble des membres du corps social. La DDHC de 1789 ne produit que la libération et des citoyens et du corps social lui-même, son contenu est de nature évolutive, alors que les lois des gouvernements corrompus sont de nature involutive.

Si nous devons juger l’arbre à ses fruits, l’homme à son parcours et les gouvernements à leurs histoires, force est de constater que la liberté telle qu’elle s’exprime dans nos sociétés modernes ne produit que de la violence, de l’agressivité, de l’intolérance, du sectarisme, de l’irrespect, des nuisances généralisées, du matérialisme égotique, de la domination et de l’asservissement. Il n’est pas nécessaire d’être particulièrement perspicace pour constater que cette liberté-là n’est pas autre chose que la loi du plus fort, l’ancienne féodalité qui a su si bien tenir le terrain et usurper le pouvoir que devait, et que doit, lui faire perdre la DDHC. Cette liberté primaire, j’allais dire de primates ignorants et égoïstes, est exactement aux antipodes de la liberté parée des vertus et de la noblesse que lui confère cette Déclaration.

Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi... Redoutable précision que celle-ci. La loi ne peut pas porter atteinte aux droits imprescriptibles de l’homme, ce fait est clairement établi et ne souffre d'aucune exception. Mais elle doit délimiter les différentes formes que prendra l’exercice de cette liberté. Étant entendu qu’il s’impose à la loi de respecter le principe qui veut que l’exercice d’une liberté, respectant le principe d’égalité, ne puisse empêcher quiconque de jouir de cette liberté... L’exercice du législateur devient terriblement subtil et périlleux, pour peu qu’il soit ignorant, corrompu ou les deux à la fois. Ce n’est pas parce que l’exercice est difficile et sophistiqué qu’il fallait d’un revers de la main s’affranchir des servitudes qu’impose la DDHC, comme le font et l’on fait tous les gouvernements. La loi doit avoir les mêmes devoirs que ceux qui sont imposés à l’ensemble du corps social. Parmi ces devoirs, résultant de cet article 4, nous avons le principe qui consiste à se préoccuper constamment à ne pas nuire, et celui de permettre à chacun de pouvoir exercer les mêmes libertés en rapport de l’égalité de droit basé sur le principe de l’utilité commune. Il est évident que cet exercice deviendra rapidement impossible si les gouvernements succombent à la restauration des privilèges. Définir par des lois l’exercice de la liberté cohabitant avec la préservation des privilèges, c’est vouloir faire cohabiter des paradoxes ingérables. Un privilège s’exerce toujours au détriment des autres, il contient en germe une nuisance sociale, il viole le principe d’égalité reposant sur le bien commun ; il constitue une épouvantable oppression ; il est l’expression même de l’asservissement, de l’arbitraire et de la corruption, rien d’autre qu’un vice.

Petite précision de passage : qu'est-ce qui distingue un privilège d'un légitime droit acquis par une distinction basé sur l'utilité commune ?

Le droit légitime repose sur une pratique effective au service de l’utilité commune ; il devient un privilège lorsque ce droit est maintenu alors que le service a disparu, ou qu’il n’a jamais existé. Exemple : maintenir à leur poste des fonctionnaires dont le service au bien commun ne s'exerce plus, ou dont l'utilité commune a disparue, (et il y en a en France plus d'un million en sur nombre) est un épouvantable privilège : celui de la garantie de l'emploi à vie.

La précision qui termine ce remarquable article 4, indique aussi que si la loi détermine les bornes de la jouissance de la liberté, cela implique obligatoirement qu’il ne puisse y avoir de liberté sans justice. Lorsque la justice de classe, comme nous la connaissons hélas actuellement, succombe à l’indignité de ne pas remplir ses obligations - en matière de strict respect des droits proclamés par cette Déclaration pour l’ensemble des membres du corps social -, elle ne fait plus que défendre des privilèges résultants de lois iniques dont les applications sont autant d’actes d’arbitraire et d’oppression que cette justice a pourtant le devoir de sanctionner, comme le précise l’article 7 de la DDHC.

Lorsque la justice ne respecte pas la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, elle commet un déni de justice, un sacrilège déshonorant et elle devient directement complice et coupable de l’arbitraire et de la corruption.


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